atelier La source du lion  2016 - web : youness Atbane et florence renault-darsi

 

 

 

 la source

du lion

Casablanca

OPNI

 

villa des arts, casablanca

juin-août 2001

 

Tout commence dès l’arrivée… depuis le grand portail en fer forgé de la villa… On traverse le jardin, on s’approche… Oui, il y a là, sous la balustrade en courbe du balcon de façade, une O.P.N.I. ! Traduisez, Objet Publicitaire Non Identifié. Une allusion à d’autres « objets » venus d’un autre monde… serait-ce à dire que les deux artistes de La Source du Lion qui présentent leurs travaux sont des envahisseurs ? D’un autre monde, non, ils sont nés tous les deux à Casablanca et y vivent en tentant d’y travailler. Du futur, certainement, si l’on considère que le présent des arts plastiques au Maroc se résume à la peinture de chevalet !

Au-delà des fonctions « concrètes » de l’image de propagande, Hassan Darsi et Rachid L’Mouddene proposent une mise en évidence des références culturelles du monde publicitaire.

Hassan Darsi greffe au papier adhésif doré - élément récurrent de ses installations plastiques - une image "icône", comme celles que produit la publicité, qu’il utilise et multiplie comme un motif de papier peint. Les "motifs" choisis sont issus d’une réalité quotidienne à la fois intime - photographie de famille - et publique - illustration d’un emballage de produit de consommation courante, qui se détache sur la blancheur de simples plaques de polypropylène. La technique de la sérigraphie manuelle et la dorure confèrent à ces images une préciosité et une force symbolique plus proches de la peinture d’icône que du quotidien auquel elles se réfèrent. Des icônes qui finissent d’ailleurs par disparaître pour ne laisser que leur empreinte mnémonique et formelle, à l’instar de logos publicitaires.

De la même façon, à partir d’images publicitaires, extraites de leur contexte, agrandies et présentées sous la forme de tondos, il magnifie une imagerie banale et érige au rang de l’art ce qui n’était que le référent d’une marque et d’un produit pour le consommateur.

Déclinées à la manière de la publicité par l’objet, ces figures emblématiques, qu’elles appartiennent à une mythologie personnelle ou à l’imaginaire collectif, s’inscrivent délibérément en décalage par rapport au schéma de communication d’usage.

Rachid L’Mouddene invente et met en scène des compositions et des ambiances photographiques « vides de sens », qui semblent nous plonger dans le mode de la représentation publicitaire. En réalité, ce travail se situe bien en deçà ou au-delà, car ici, tout concoure à faire disparaître, à masquer les images : leur rétrécissement tout d’abord - les photographies sont extraites de planches contact - les « ratures » ensuite, qui viennent en perturber la lecture et procèdent ainsi de ce même effacement de la figuration qui caractérisait ses précédents travaux « Rature 1-2 et 3 ».

Ses mêmes « ratures » que l’on retrouve comme une image récurrente sur les vrais-faux emballages - vrai, parce qu’ils sont réalisés à partir de modèles existants… Faux, parce qu’ils ne contiennent (encore !) rien - suspendus dans l’espace de la salle ou encore dépliés et plaqués au mur.

C’est l’apparence des « objets », leur étalage, leur contenant, leur mode de présentation que tend à mettre en exergue l’artiste, finalement, cet aspect souvent superficiel et idéalisé que nous donne la publicité des « choses ». À l’instar de ses photographies séduisantes de fruits et légumes, qui ne sont en fait que le détail d’une scène qu’est la rue, avec son lot de pollutions et d’images beaucoup moins flatteuses.

 

(Florence Renault  in Architecture du Maroc N°1, Juin-juillet 2001)

 

 

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